La marque Philippe Lavier Guitars a été fondée en 2020 avec l’objectif de proposer des guitares électriques hors du commun.
Guitariste depuis 30 ans et actif dans la scène métal depuis 25 ans, j’ai toujours eu une prédilection pour les guitares aux formes atypiques, sans jamais sacrifier l’ergonomie et la jouabilité. À la recherche de l’instrument idéal, j’ai ressenti le désir de concevoir la guitare de mes rêves. C’est ainsi qu’est née Delta, un modèle qui sera bientôt disponible sur commande.
L’inspiration
C’est lors d’une réunion interminable que, laissant mon esprit vagabonder, j’ai commencé à tracer quelques lignes sur une feuille quadrillée. Carré, méticuleux et consciencieux, je travaillais alors comme intégrateur web, appréciant le travail au pixel près. Naturellement, de grandes lignes droites et parallèles ont pris forme, donnant naissance à cette guitare aux angles marqués. Elle m’a immédiatement séduit. Elle m’a inspiré non seulement son nom, mais aussi le logo de la marque.
De l’envie à la réalité
Avoir des idées, c’est bien, mais il faut savoir les concrétiser. Bricoleur chevronné, j’ai dû m’équiper des quelques machines et outils indispensables à la lutherie et apprendre à les utiliser. On s’imagine toujours qu’avec les bons outils, on travaillera mieux et plus vite. J’ai donc étoffé mon parc de machines, grâce à des bonnes occasions et des réalisations maison comme une défonceuse sous table, une ponceuse orbitale,.. Sans oublier les équipements essentiels comme un bon système d’aspiration dans l’atelier.
Engranger des connaissances
En tant que musicien, on ne se rend pas toujours compte de la quantité de connaissances nécessaires à la réalisation d’une guitare. Il faut bien sûr maîtriser des notions techniques. Ce que l’on effleure à peine en tant que simple guitariste : le diapason d’une guitare, les différents montages possibles d’un manche et son éventuelle inclinaison, un scarf joint pour renforcer la tête, etc. Il est aussi essentiel de comprendre les propriétés du composant principal d’une guitare, le bois : les essences couramment utilisées en lutherie, exotiques ou locales, leurs propriétés respectives, les sens de coupe, etc. Heureusement, aujourd’hui, nous avons la chance inestimable de disposer de ce puits de connaissances qu’est Internet. J’en profite pour remercier tous ceux qui m’ont inspiré et aidé à trouver les réponses nécessaires pour avancer.
Travailler vite et bien
J’aime le fait-main, mais les instruments de musique nécessitent une précision extrême. Je voulais aussi m’assurer de pouvoir garantir une reproduction exacte d’une guitare à l’autre, notamment pour le manche. C’est là que les gabarits interviennent. On se met à en créer pour tout, et il faut avouer que c’est pour moi une des parties les plus intéressantes : imaginer et concevoir pour faciliter la fabrication. Trouver les astuces pour être le plus efficace et précis possible devient alors un véritable défi et un plaisir.
Formation
Autodidacte évoluant au gré de mes envies, je souhaitais tout de même apprendre via une formation auprès d’un luthier pour voir si j’apprécierais de travailler à plein temps dans ce métier. Je me suis alors inscrit chez Gabin Graff, un luthier proposant des stages pour réaliser sa propre guitare. Il doit encore se souvenir de moi. Réaliser un manche conducteur en deux semaines était un pari risqué, mais cette expérience m’a vraiment convaincu du plaisir que je prends à réaliser des guitares.
D’un essai à l’autre
Par souci de me faire la main avant de passer aux choses sérieuses, j’ai d’abord commencé par rectifier une guitare de forme AX à laquelle je voulais redonner une seconde jeunesse. Compagne de longue date, sa peinture blanche, sans vernis protecteur, avait fini par virer au crème, voire au jaune, à cause du tabac et de la transpiration. J’en ai profité pour retoucher légèrement la forme générale du corps et de la tête.
Ensuite, j’ai réalisé une ébauche de Delta dans un morceau de plan de travail en agglo pour tester le travail avec une défonceuse et apprécier l’ergonomie générale du corps avant le stage. J’ai ensuite eu l’occasion de récupérer une Morgane de forme Les Paul, que j’ai complètement revisitée pour en arriver à MECA.
Mon dernier essai de customisation et d’entraînement a été basé sur le manche d’une Aria Pro II récupérée en brocante. Le corps en contreplaqué ne m’inspirait pas du tout, mais voulant rester dans l’idée d’une « customisation », j’ai revisitée la Telecaster pour aboutir au projet HOLLOW.
Les choses sérieuses
Conforté par toutes ces expériences, il était temps de sauter dans le grand bain. J’allais sans doute encore rencontrer quelques obstacles, mais il fallait réaliser un projet de A à Z. Jusqu’à présent, je n’avais pas encore affronté ce qui me faisait vraiment peur : façonner un manche de guitare à partir de zéro. Pour beaucoup, c’est la partie la plus intimidante, mais je ne voulais pas céder à la facilité en achetant des manches tout faits et en ne retouchant que la forme de la tête, surtout que je suis adepte des manches conducteurs.
J’aurais pu simplement me lancer dans la construction d’une deuxième Delta. Mais ma fièvre créatrice avait donné naissance à bien d’autres esquisses. La première à voir le jour dans mon atelier fût ORCA. Elle m’amena à sortir de ma zone de confort en m’inspirant un énorme pickguard. C’était une chose dont je n’étais pas friand jusqu’alors. Mais cela offrait un réel plus esthétique sur ce modèle. Comme quoi, on évolue constamment.
Quand on aime on ne compte pas
Cette expression prend tout son sens autour de tels projets. On pourrait parler du fait de lancer son activité qui, en plus d’être un sacerdoce, est déjà une activité pluridisciplinaire et chronophage. Mais c’est indispensable de ne pas compter ces heures pour proposer ce qui importe vraiment : les vrais projets, ceux qui vous animent.
La conception d’une guitare fait appel à notre imagination, nos envies, notre sens de l’esthétisme et nos émotions, et nos connaissances. En plus de plaire et de garder l’essence de la marque, la touche personnelle, le projet doit rester réalisable. C’est là où la maîtrise des méthodes de fabrication est cruciale.
Une fois l’aspect global défini, il faut réfléchir aux différents éléments qui vont équiper l’instrument. Il faut également envisager les diverses déclinaisons possibles. Le cahier des charges ne sera pas le même entre une guitare à 6 ou 7 cordes. Le diapason peut aussi varier avec des frettes peuvent être en éventail. Le cordier peut être flottant ou fixe, etc. On a tous nos préférences en matière de chevalet ou de disposition des micros. Mais cela varie forcément d’un musicien à l’autre. Mieux vaut avoir envisagé tous ces aspects au préalable. En résumé, ce sont des dizaines, voire des centaines d’heures de réflexion et d’essais sur papier et/ou sur ordinateur avant de finaliser un plan.
Un tel accouchement mérite bien de porter un nom. C’est encore une autre partie de la conception où l’imagination est mise à rude épreuve.
Avant la réalisation, il est crucial de trouver les bons fournisseurs pour le bois et les pièces détachées. Ces pièces doivent être toutes disponibles avant de commencer le projet pour valider les plans.
Un instrument qui a de la valeur
Vous l’aurez compris, la réalisation d’une guitare ne se fait pas en un claquement de doigts. C’est ce qui en fait un travail manuel intéressant et très enrichissant pour l’esprit. Outre son originalité, c’est aussi ce qui justifie le prix d’un tel instrument car on ne parle pas d’un concept industriel largement éprouvé et rentabilisé. Il s’agit ici de la création d’un bijou fait main, rare et customisé. Et c’est ce savoir-faire qui rend possible la création de l’instrument de vos rêves.